La société des Ateliers et chantiers de France est fondée le 20 avril 1899 à Dunkerque, à l’est de l’avant-port afin de doter le port de Dunkerque, nouvellement modernisé par le plan Freycinet, d’une activité de construction et de réparation navale. La première commande est constituée de quatre-mâts barques pour l’armement Bordes. C’est en 1903 que les chantiers entreprennent la construction de bateau à vapeur avec les paquebots Ville de Paris et Ville du Havre. Lorsque la guerre éclate en 1914, les chantiers sont en plein essor et comptent un effectif de 2 400 personnes. Au cours de l’Entre-deux-guerres, le chantier participe au programme de construction de navires de guerre pour la Marine Nationale. Néanmoins, le chantier poursuit aussi ses constructions de navires de commerce, dont la plus belle réalisation, durant cette période, est le pétrolier Émile Miguet, qui, avec 21 350 tonnes, est en 1937 le plus gros pétrolier du monde. Cette période est marquée par l’arrivée du directeur le plus emblématique du chantier, Lucien Lefol. Ce dernier entre au chantier, en tant qu'ingénieur au début des années 1920, avant d’atteindre le poste de directeur général au cours de la même décennie. Lorsque éclate la deuxième guerre mondiale, le chantier est en pleine construction de deux pétroliers, le Seine et le Saône. Lors de cette guerre, le chantier subit de graves dégâts aussi bien en 1940 qu’en 1944.
À la Libération, les installations sont pratiquement détruites et les deux pétroliers ont été sabordés par les Allemands. L’activité reprend très vite ; les deux pétroliers remis sur cale sont finalement livrés en 1949. Lucien Lefol restera à la tête de l’entreprise jusqu’en 1961, malgré le rachat en 1956 par le groupe Schneider SA. Sous le contrôle du groupe, une première fusion a lieu en 1960 avec les Forges et chantiers de la Gironde-Bordeaux, autre entreprise de construction navale du groupe. La société prend le nom de France-Gironde. Cette fusion, préconisée par le livre blanc sur la construction navale de 1959, se révèle être une très mauvaise opération financière pour le chantier de Dunkerque, qui doit éponger les résultats déficitaires du site de Bordeaux. Cette situation débouche sur la fermeture du chantier de Bordeaux en 1969. L’entreprise prend la raison sociale de France-Dunkerque.
En 1970, l’équipe dirigeante de la société est composée de Jean Forgeot, président directeur général, de Gérard Chauchat, vice-président directeur général, de Jean Lefol (fils de lucien), directeur général d’exploitation, de M. Rouilleaut, directeur du chantier, de M. Daval, directeur de la production et de M. Longatte, directeur commercial (réunion présidence Schneider SA, janvier 1970). Cet organigramme évolue très peu jusqu’en 1982, à ceux-ci près que Gérard Chauchat devient président directeur général à la place de Jean Forgeot. Durant cette période, l’entreprise poursuit sa politique de modernisation afin de rester compétitive sur un marché hautement concurrentiel. De plus, le chantier opte pour la construction d’unités de plus petite taille mais à la technicité très poussée. Cette option est parfaitement illustrée par la construction d’un grand nombre de méthaniers qui fait de Dunkerque le leader mondial dans ce domaine. Dans le même temps, les pouvoirs publics incitent les entreprises de construction navale à se regrouper. Le groupe Schneider SA étudie alors la possibilité d’une fusion de Dunkerque avec les chantiers de l’Atlantique, seul autre chantier français soutenu par un groupe d’importance similaire. Finalement, ce projet n’aboutit pas et Schneider SA décide de la fusion de France-Dunkerque avec la société métallurgique de Normandie (SMN).
L’objectif de cette fusion est de créer une société capable de résister aux crises cycliques qui touchent régulièrement la construction navale et la métallurgie. Cette fusion est effective en 1977. Le nouveau groupe prend le nom de Société métallurgique et navale Dunkerque-Normandie. Dans un premier temps, la fusion semble être une réussite puisque les pertes de la division métallurgique sont compensées par les bénéfices de la construction navale. Néanmoins, avec le deuxième choc pétrolier, la construction navale rentre à son tour dans un cycle de crise alors que la métallurgie n’était pas encore sortie du sien ; le système de compensation ne peut plus fonctionner. Compte tenu de la situation, la décision de séparer les deux branches est prise en 1982.
Sous la pression des pouvoirs publics, Schneider SA accepte le fusion de France-Dunkerque avec les Constructions navales de La Ciotat (CNC) et les constructions navales et industrielles de la Méditerranée de La Seyne (CNIM) qui aboutit à la création des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (NORMED). Cette fusion est trop tardive pour sauver les trois sites si bien qu’en 1986, la liquidation de la Normed est prononcée. Les site de Dunkerque ferme définitivement ses portes en 1987 après le lancement du Nord Pas de Calais, le 15 avril 1986.
Les origines des Constructions navales et industrielles de la Méditerranée datent de 1856 avec la fondation de la Société des forges et chantiers de la Méditerranée (FCM), dont l’établissement principal se trouvait à La Seyne-sur-Mer. Au cours de la guerre 1914-1918, elle transforme partiellement ses activités de construction navale et devient le premier constructeur mondial de chars de combat.
Durant l’entre-deux guerres, les FCM construisent de nombreux paquebots et cargos, ainsi que le croiseur Montcalm et plusieurs bâtiments légers pour la Marine nationale. Après la Seconde Guerre mondiale, les chantiers exportent des cargos spéciaux à l’étranger.
En 1966, les FCM sont liquidées, et les chantiers de La Seyne sont repris par le groupe Herlicq sous le nom de « Constructions navales et industrielles de la Méditerranée ». À partir de cette date, la stratégie de l’entreprise est de se spécialiser dans la construction des navires transporteurs de gaz (en particulier de méthane liquide selon la technique de Gaz-Transport), à côté de navires plus traditionnels tels que les cargos et les paquebots.
Au début des années 1980, l’entreprise développe aussi ses activités dans le domaine des équipements de plates-formes off-shore pour la prospection et l’extraction du pétrole, et se lance dans l’étude de navires anti-pollution. Néanmoins, la crise du marché européen de la construction navale, ainsi que les pressions gouvernementales, conduisent en 1983 à la fusion des CNIM avec les Chantiers de France-Dunkerque et les Constructions navales de la Ciotat. La nouvelle société des Chantiers navals du Nord et de la Méditerranée (NORMED), ne résiste pas mieux, et est déclarée en faillite en 1988. Redevenu CNIM après 1988, le site de La Seyne-sur-Mer s’est reconverti dans la mécanique de précision, la protection de l’environnement et la production d’énergie.
Avant 1851, on sait peu de chose sur les chantiers de construction navale de La Ciotat. À cette date, ils appartiennent à la Compagnie des messageries maritimes, qui les cède en 1916 à la Société provençale de constructions navales (SPCN) créée à cet effet. En janvier 1940, le groupe Terrin les rachète et leur donne la raison sociale sous laquelle ils seront désormais connus, les Chantiers navals de La Ciotat (CNC).
En 1970, les CNC, qui travaillaient jusque-là dans tous les secteurs de la construction navale, se spécialisent dans la construction de navires à haute technicité. C’est pourquoi, en plus des rouliers et des pétroliers qui représentent toujours la majeure partie de leur production, ils construisent des navires frigorifiques ou des méthaniers, armés pendant plusieurs années dans l’Arsenal de Toulon, et effectuent des réparations et des transformations à la demande des armateurs. Les constructions off-shore constituent également une part importante de leur chiffre d’affaires, à côté des appareils à gouverner et des moteurs auxiliaires sous licence.
Parallèlement, les CNC s’associent avec d’autres chantiers comme les Ateliers et chantiers de Seine-Maritime (ACSM), et d’autres collaborations se mettent en place avec les sociétés fournissant du matériel pour la construction navale. Des entreprises sont créées pour permettre aux CNC d’augmenter leur capacité de production ; ainsi, la Grande forme de La Ciotat (GFC), créée en 1967, leur loue-t-elle une cale. Les CNC n’en possédaient alors que deux, dont la capacité limitée n’autorisait pas la construction de navires jaugeant plus de 20 000 T. ou de 80 000 m. Grâce à cette cale supplémentaire, les CNC peuvent désormais construire des pétroliers de 328 000 T ou des méthaniers de plus de 200 000 m. Les deux sociétés fusionnent en 1975.
Malgré ce vaste programme d’investissement visant à augmenter la production tout en diminuant le recours aux sous-traitants, les CNC ne peuvent faire face à la crise de la construction navale. La création des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (Normed) en 1982 par fusion des CNC, des chantiers de France-Dunkerque et des Constructions navales et industrielles de la Méditerranée (CNIM), sous l’égide des pouvoirs publics, ne permet pas de sauver l’entreprise, qui fait faillite en 1988.